Caen 2020 – Les idées pour évoluer
A l’approche des élections, nous avons lancé un appel à idées au sein de notre réseau pour remonter des propositions pour la ville. Ces propositions sont évoquées par nos adhérents, sans que tous les membres de l’association y souscrivent. C’est aussi le but de notre association que de provoquer le débat et essayer de sortir, un peu, des sentiers battus. Première étape aujourd’hui, avec une question ardue : Caen et les communes de la première couronne doivent-elles fusionner ?
L’INSEE a rendu son verdict, et il est implacable pour Caen. La ville perd encore des habitants. 3000 entre 2012 et 2017. Il n’y a plus que 105 000 habitants. La barre des 100 000 se rapproche, avec les conséquences que cela entraînera, tant de manière symbolique que de moyens pour la collectivité (une partie des fonds versés par l’État est lié à la population de la commune). Certes, le phénomène n’est pas spécifique à la capitale régionale. Rouen, Le Havre sont aussi touchées. Pendant ce temps, les grandes villes de l’Ouest continuent à progresser : Rennes, Nantes, Angers, Brest… Accentuant le décrochage entre nos territoires. La scène politique locale s’empare de ces chiffres : l’opposition dit que c’est la faute de la majorité, la majorité explique que ce qu’elle a enclenché a stoppé l’hémorragie et va nécessiter du temps pour produire ses effets. Les caennais se demandent comment cette évolution est possible, alors que tant d’immeubles sont actuellement en construction à Caen. Bon. Il y a sûrement un peu de vrai chez chacune de ces positions, et nous n’avons pas la possibilité ni la volonté de départager les camps.
En revanche, le rédacteur du présent article pense nécessaire de changer d’échelle.
Parce que lorsque l’on regarde la carte des variations de population, il y a un point qui nous interpelle. Est-ce que tout le territoire perd de la population ? Non. Autour de Caen, seuls Rosel (-27), Breteville sur Odon (-67) et Saint Germain la Blanche Herbe (-130) perdent de la population. Partout ailleurs, la population croit. On pense aux cas d’Hérouville Saint Clair (2e ville du département, principalement suite à l’effondrement de Lisieux et encore loin de sa population du début des années 1990), de Biéville-Beuville, de Colombelles, de Mondeville, de Saint Contest ou de Cambes en Plaine.
Ces communes sont devenues la banlieue de Caen au sens de continuité urbaine. Les gens qui y habitent vivent, travaillent, consomment sur le territoire caennais. Ils circulent également. Cette interpénétration des territoires génère des conséquences assez négatives. On peut en citer quelques-uns :
- concurrence entre les communes qui aboutit à de la surconsommation foncière. On pense par exemple aux deux projets concurrents sur la presqu’île entre Hérouville et Caen,
- difficulté d’organiser les déplacements de façon cohérente (cf. la situation sur le plateau nord ou sur le périphérique),
- phénomène de dénigrement du voisin (qui n’a jamais entendu dire qu’on payait trop d’impôts à Caen alors qu’on pourrait peut être retourner la focale et se dire que c’est surtout dans les autres communes que l’on n’en paye peu parce que les équipements sont payés par d’autres…)
Nous pensons qu’il serait intéressant d’envisager une fusion des communes de l’ensemble constitué autour de Caen. Malgré ses qualités, la Communauté urbaine ne permet pas d’obtenir des résultats rapides et satisfaisants. Il ne s’agit pas, comme à Cherbourg, de fusionner toutes les communes de l’agglomération, mais bien de se limiter à réunir les communes qui forment un ensemble cohérent. Une proposition de liste ? En voici une :
- Authie
- Biéville Beuville
- Breteville sur Odon
- Caen
- Carpiquet
- Cambes en Plaine
- Colombelles
- Cormelles le Royal
- Epron
- Fleury sur Orne
- Hérouville Saint Clair
- Ifs
- Louvigny
- Mondeville
- Saint Contest
- Saint Germain la Blanche Herbe
Il ne s’agit pas d’ôter à ces communes la reconnaissance de leur identité et de leur autonomie. Ces territoires pourront conserver des élus de référence, pour ne pas rompre le lien entre la commune et les habitants. Par ailleurs, il existe des dispositifs budgétaires qui permettraient de conserver l’autonomie de chacun tout en reconnaissant la nécessité de s’inscrire dans un contexte plus large.
Le choix de l’existence d’un noyau resserré permettrait de mobiliser plus facilement les énergies autour des projets structurants et permettrait une certaine équité de traitement. Par exemple, le sujet de l’interikea aurait sûrement été plus simple à gérer avec une seule commune plutôt que d’aboutir à la situation actuelle où, de ce que nous comprenons, la mairie de Fleury y est favorable, la Mairie de Caen non, et la communauté urbaine pas vraiment non plus mais ne peut pas s’y opposer.
Par ailleurs, cela permettrait une harmonisation des impositions locales, un déploiement plus large de dispositifs à destination des citoyens (par exemple les écoles de musique publiques pourraient voir leurs moyens renforcés et leur public éligible élargi…) et également d’écarter le couperet des 100 000 habitants pour Caen. Car que l’on ne s’y trompe pas, si Caen passe sous cette ligne de flottaison, c’est tout le territoire et ses habitants qui en paieront les conséquences : choix des implantations d’entreprises, politiques publiques nationales et régionales, image du territoire durablement marquée négativement. Pendant longtemps, les communes ont pu se mettre des bâtons dans les roues, refuser de collaborer pour s’empêcher de se développer mutuellement. Aujourd’hui, ces méthodes pichocrolines et à courte vue risquent surtout de contribuer au décrochage du territoire dans son ensemble.
Reste une dernière objection : les maires sont-ils prêts à ne plus être Maire de leur commune mais délégué d’une commune ? Nous n’avons pas de réponse sur ce point, tout au plus pouvons-nous remarquer que les maires d’arrondissement dans les grandes communes ne semblent pas réclamer l’indépendance desdits arrondissements.
Elise TUCET